dimanche 27 février 2011

Cuba - La vie des gens (et de nous) - III

Si les rencontres avec les cubains ont été aussi riches, c'est surtout parce qu'ils sont instruits. Contrairement à ce que j'ai pu voir au Ghana par exemple, où on avait du mal à aborder des sujets sérieux où faire de l'humour même avec les étudiants sortant de l'université la plus prestigieuse, on peut avoir une conversation normale avec n'importe quel cubain. Histoire, géographie, sciences, ils sont très cultivés dans tous les domaines, bien que leur vision du monde soit façonnée par l'idéologie du parti. L'éducation est certainement le premier moyen qu'utilise le parti pour assujettir la population. Au bac, les matières sont biologie, mathématiques et histoire. L'histoire politique est la première chose enseignée aux cubains. Si l'accès à l'éducation est gratuit et garanti pour tous les cubains, Nelson nous confie que pour rentrer dans la meilleure université de la Havane, il faut premièrement faire partie d'une famille révolutionnaire, et ensuite seulement l'excellence rentre en compte. Le gouvernement assure ainsi la docilité de l'élite intellectuelle. Mais pour nous, encore une fois, cette situation est une aubaine, car cela permet un échange profond et des conversations émouvantes, malgré leur illégalité...


Des écoliers dévorant des glaces à la sortie des classes.

Au détour d'une ballade, Nelson nous montre avec fierté l'hôpital de Santiago, où il est né. C'est l'autre grande fierté du régime : la santé est gratuite pour tous les cubains. L'espérance de vie avoisine celle des pays développés, l'eau courante est potable, et la médecine cubaine n'a rien à envier à celle de son voisin américain. D'ailleurs, le tourisme médical connaît un grand essor : nombreux sont les Canadiens ou Mexicains qui n'hésitent pas à prendre un avion pour bénéficier d'un service de santé d'excellente qualité à un prix dérisoire. Plus récemment, Cuba voit de nombreux étudiants d'Amérique du sud ou même des États-Unis viennent grossir les rangs des facultés de médecine cubaines, qui, étant de très bon niveau, gratuites et au soleil, ont de quoi en séduire plus d'un..

Mais si les cubains sont bien éduqués et bien soignés, il n'empêche qu'ils n'ont pas grand chose à mettre dans leur assiette. La principale source de revenu du pays est le tourisme, ce qui crée un déséquilibre incroyable entre la partie de la population en contact avec des touristes et les autres. Un serveur peut gagner en une journée de pourboires trois fois le salaire mensuel d'un prof ! Beaucoup n'hésitent pas à tirer un trait sur une carrière intellectuelle pour aller faire le ménage ou de l'animation dans des hôtels pour touristes, où la proximité avec les dollars est alléchante. Nelson n'hésitait pas à sécher les cours pour venir traîner avec nous : notre compagnie avait bien plus de valeur à ses yeux que du savoir qui ne le mènera jamais à rien. Le manque de perspective et la situation économique déplorable décourage et désespère cette population qui, instruite, en a conscience. Les regards des cubains volés à travers quelques photos sauvages sont souvent empreints d'une douloureuse tristesse.




La vieille au cigare. Elle venait là tous les jours, attendant que des touristes la prennent en photo en échange de quelques centimes.

Les sœurs


Bulles de savon, jeu universel.

En attendant que le touriste descende du bus

Une policière tente de combler les longs moments d'attente entre le départ de deux bus.


Sur la plage, un homme et sa fille nous écoutant jouer des chansons cubaines avec un sourire ému


(Vous l'aurez compris, j'aime les enfants et les vieux)

Mais cuba n'est certainement pas un pays triste, c'est un pays qui chante et qui danse, à la fois caraïbéenne, latino et africaine. Un cocktail explosif ! Le samedi et le dimanche, à Santiago, l'avenue principale est rendue piétonne et de nombreux stands de bouffe, de boisson et surtout de musique sont montés. Les cubains la déambulent, s'arrêtant au hasard des rencontres pour une partie de dominos, un verre de rhum sec ou une petite salsa. Au bout de l'avenue, du raggaetòn est diffusé à pleine balle, et les jeunes se retrouvent au rythme de cette musique obsédante. Les cubains sont très souriants, et comme les africains ils adorent rigoler. La barrière entre touristes enviables et locaux fascinés est très vite dépassée (la guitarre nous a beaucoup aidées, mes les blagues suffisent souvent). C'est des petits clowns qui se marrent tout le temps, et dansent jusqu'au bout de la nuit pour oublier quelques heures le manque de perspectives, la prison à ciel ouvert dans laquelle ils sont enfermés.

Un Samedi soir à Santiago de Cuba

5 commentaires:

Steph a dit…

Magniifiques tes photos Nath!

LaureThi a dit…

Superbes ces photos ! Et merci pour cet article qui m'a fait découvrir un peu de l'ambiance ... c'est que tu me donnerai envie d'y aller !!

Nina a dit…

Merci les filles !
(@ Laure: Genre tu voyages pas assez cette année..)

Anonyme a dit…

Ha ba zut alors, je suis ghanéenne justement, par mon papa... ;) Merci pour ce voyage qui se prolonge en te lisant!

Nina a dit…

@Rebecca : Ahah, je voulais pas blatter les ghanéens, juste souligner le degré d'instruction impressionnant des Cubains, ramené à la pauvreté dans laquelle ils vivent..
Le Ghana est aussi un merveilleux pays !

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